Dimanche, nous avons commémoré avec émotion le souvenir des déportés juifs. Retrouvez mon discours ci-dessous:
"Madame la Présidente Martine Dahan,
Monsieur le Vice-Président Lucien Naïm,
Mes chers collègues,
Mesdames, Messieurs,
C’est un grand
honneur pour moi d’avoir accepté l’invitation de Mme Martine Dahan, présidente de l’association culturelle juive de
Clamart, pour être avec vous et avec les membres de l’association ce matin.
Nous rendons
hommage aujourd’hui, en ce jour de commémoration de la Déportation, à tous ces
martyrs, victimes de la barbarie des nazis et de leurs zélés collaborateurs.
Nous rendons également hommage aux Justes, ces Français qui ont bravé l'autorité pour sauver de nombreuses familles juives sur notre territoire.
Je me souviens
toujours avec une très grande émotion de ce dimanche 29 avril 2007 où, avec Joël Mergui, alors président du
Consistoire de Paris, avec Lucien Alezra,
président fondateur de la Communauté de Meudon-Clamart, entourés de nombreux
élus et de plusieurs centaines de personnes, nous avons découvert cette plaque
en l’honneur des déportés juifs de Clamart.
20 noms sont
inscrits sur cette plaque.
Les noms
d’hommes, de femmes et d’enfants, assassinés parce qu’ils étaient juifs.
Disparus dans
l’horreur la plus absolue que fut la Shoah, la plus grande tragédie du 20ème
siècle, décidée par les nazis et exécutée sur notre territoire, il faut le
dire, avec la collaboration de leurs complices français.
Il y avait en
1940, selon Serge Klarsfeld, président de l’association des « Fils et filles des déportés juifs de France
», environ 330 000 juifs en France, 200 000 de nationalité française et 130 000
de nationalité étrangère.
75721 juifs
furent déportés. Seuls 3% revinrent de l’horreur des camps. Aucun des déportés juifs de Clamart n’a
survécu.
Sur les 20
personnes déportées de Clamart, 14 étaient de nationalité étrangère : 7
polonais, 3 d’un autre pays de l’Empire russe, un de Salonique, et deux
réfugiés allemands. 6 étaient français, comme les enfants de Joseph Blaszka.
Lui-même, né en Pologne avait obtenu la nationalité française en 1928.
Je ne peux
m’empêcher à cet instant de penser à ce judaïsme d’Europe Centrale qui a
aujourd’hui disparu.
Toutes ces
familles installées à Clamart manifestent une réelle volonté d’intégration.
Tous leurs enfants vont à l’école de la République. Les
juifs de Clamart, très légalistes comme beaucoup, se font malheureusement
recenser, ne sachant pas que les mâchoires du piège mortel viennent de se
refermer sur eux.
Parmi les 20
victimes clamartoises de la Shoah, 13 furent victime de la rafle du Vel d’Hiv
organisée par la police allemande de Danneker et Oberg et réalisée par la
police française sous les ordres de René Bousquet et Jean Legay. Elle débutera
à l’aube du 16 juillet 1942 et dura deux jours. 12 884 juifs sont arrêtés (4
051 enfants, 5 802 femmes et 3 031 hommes) à Paris et en banlieue par 9000
policiers et gendarmes français…
Nous savons où
mène l’antisémitisme, la haine des juifs : elle mène à la mort.
La lutte contre
l’antisémitisme est donc pour moi totale et non négociable.
Elle prend aussi,
ne nous y trompons pas, des nouveaux habits : l’antisionisme et la haine
d’Israël. Nous ne sommes pas dupes que cela constitue en fait les modernes
oripeaux de l’antisémitisme.
C’est pourquoi
nous avons non seulement un devoir de Mémoire, pour les martyrs, mais également
un devoir de vigilance : pour les générations actuelles et futures.
Devoir de mémoire
en dévoilant cette plaque le 29 avril 2007. Devoir d’espoir en inaugurant deux
mois après, le samedi 30 juin 2007 l’école maternelle Anne
Franck dans le Haut-Clamart.
Je voudrais
conclure mon propos par un court extrait d’un poème de Charlotte Delbo, femme de lettres française encore trop méconnue
malgré une œuvre majeure. Résistante, déportée à Auschwitz par le convoi du 24
janvier 1943, un convoi de 230 femmes dont elle racontera le destin après la guerre. Déportée
ensuite à Ravensbrück, elle sera libérée par la Croix Rouge le 23
avril 1945.
Voici les mots de
Charlotte Delbo :
« Je reviens d’un autre monde
dans ce monde
que je n’avais pas quitté
et je ne sais
lequel est vrai
dites-moi
suis-je revenue de l’autre monde?
Pour moi je
suis encore là-bas
et je meurs
là-bas
chaque jour un
peu plus je remeurs
la mort de
tous ceux qui sont morts
et je ne sais
plus quel est le vrai
de ce monde-là
de l’autre monde là-bas
maintenant je
ne sais plus quand je rêve
et quand je ne rêve pas. »
Je vous remercie."